Corde-serpent: quelques remarques sur la potique compare des textes philosophiques, страница 2

Ce parallélisme incontestable et évident entre les deux textes cités nous intéresse particulièrement par le fait qu’il s’agit, dans les deux cas, d’une similitude contextuelle. En effet, il s’agit d’acquérir des connaissances véridiques, en opposition avec les précédents jugements, qui sont erronés et illusoires. Les différences sont, elles aussi, patentes; mais, néanmoins, l’exemple de la «corde-serpent» s’intègre de la même façon dans le contexte «gnoséologique», ce qui est frappant.

2. L’OCCIDENT

Revenons maintenant à la Grèce. On remarquera que le deuxième passage dans lequel Sextus Empiricus (AM VII. 187–188) utilise le même exemple représente un remaniement ultérieur du premier. La situation est analogue, mais elle est décrite de façon plus imagée et avec plus de détails, on pourrait dire «en gros plan». Le schéma logique de l’exemple précédent est modifié:

                                                                                                                                                        

PH I. 227–228. 

MK 17–18.

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[Par exemple, voyant une corde enroule (20 ) dans une chambre obscure, on peut sauter par-dessus, pensant sur-le-champ qu’il s’agit d’un serpent ("); mais, revenant sur ses pas, on se rend compte de l’videncde et aperevant qu’elle est sans mouvement, est dj enclin  croire qu’il ne s’agit point d’un serpent; se ravise pensant que les serpents aussi peuvent rester sans bouger, saisis par le froid hivernal, taquine la forme enroule () avec son bton, et, ensuite, ayant confront tous les faits ( ( ) s’tant prsents  l’esprit, assume le fait que l’objet peru comme un serpent, n’est point un

et sa reprsentation tait errone][1].

Selon Sextus Empiricus, Carnéade utilise cet exemple pour illustrer sa théorie de la vraie connaissance du monde. Il est évident qu’il se représentait le processus de l’acquisition de la vérité comme allant de la preuve par «la mise au grand jour» du contraire par le biais de la parole qui démontre le vrai à la suite d’une investigation scrupuleuse et objective. La troisième catégorie des «représentations par l’esprit» (les représentations explicites, démontrées de toutes manières et inaltérables ( ? #(  ' ) semble ne pas s’inscrire dans le schéma de l’exemple cité, pour l’illustrer il évoque d’autres images, celles-ci typiquement grecques[2].

A vrai dire, à part ces deux citations de Carnéade dans l’œuvre de Sextus Empiricus, on ne trouve pratiquement plus d’exemples analogues dans la philosophie grecque.

Pourtant, contre toute attente, on retrouve le même motif, à quelques siècles plus tard, chez St. Jean Chrysostome (mort en 407 après J. C.). Il y a recours au moins à trois reprises. Ainsi dans ses «Homélies» (II. 1; vol. 49, p. 233), il s’adresse aux cathéchumènes en ces termes:

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[Étudie la nature des choses plus soigneux! Car, quand la nuit viendra et les ténèbres s’épaissiront, souvent, ayant vu une corde, on peut la prendre pour le serpent].

Un exemple similaire se retrouve dans ses «Commentaires des Psaumes» (9 (8). 1; vol. 55, p. 122), dans lesquels Chrysostome affirme que la peur n’est pas inhérente à la nature des choses, ce sentiment dépend du choix préférentiel ().

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[De même souvent, dans l’obscurité, on a peur d’une corde, l’ayant prise pour un serpent].

Finalement, le même exemple est cité dans «l’Homélie sur l’Epître aux Ephésiens» (XII. 3; vol. 62, p. 92), où Chrysostome use de la «corde-serpent» pour condamner la cécité des philosophes